
San Francisco, 1962. Une jeune femme et un avocat entament un jeu de séduction chez un oiseleur. Afin de le revoir, elle use d’un stratagème et décide de lui livrer elle-même un couple d’oiseaux, “les inséparables”. Sur la route, elle est attaquée par une mouette. Bientôt d’étranges phénomènes liés au comportement des oiseaux annoncent un drame imminent…
Les battements du suspense
Après les grandioses « Fenêtre Sur Cour », « Sueurs Froides », « La Mort Aux Trousses » et « Psychose » pour ne citer qu’eux, la réputation du grand cinéaste Alfred Hitchcock n’est plus à refaire. Maitre du suspense et habile dans sa façon de filmer ses comédiens et les paysages, il renoue de nouveau avec une œuvre de suspense et nous fait vivre une expérience hautement visuelle. Inspiré de faits réels et de la nouvelle de Daphne du Maurier, il exploite l’attaque inexpliquée d’oiseaux sur les hommes. La fascination pour ce mal inconnu ne nous éclairera pas davantage sur l’origine du drame. Ce que le metteur en scène présente, ce sont essentiellement les conséquences qui virent à l’horreur.

Si l’intrigue s’amorce avec un semblant de romance, au parfum burlesque, il y aura plus encore à débattre une fois ce premier acte passé. Et bien qu’elle puisse être hors-sujet à la problématique principale qui nous préoccupe, sans cette toile de fond, nous ne pourrons en apprécier son premier degré, très ferme. C’est Melanie Daniels (Tippi Hedren) qui initie donc la charge visuelle, grâce à son teint de rêve et sa silhouette parfaite. On y retrouve bien un modèle Hitchcockien, où la jeune et belle demoiselle fera l’objet de tous les malheurs que le réalisateur lui réserve. Son caractère envers autrui est un exemple qu’il est nécessaire de faire évoluer et le personnage, comme la comédienne, l’apprendront à leurs dépens.

Mitch Brenner (Rod Taylor) est cet homme si charismatique qui attire l’insolente Melanie. Il symbolise rapidement la part érotique de l’œuvre, s’entremêlant ou se confondant avec la violence qui se dégage de l’écran. Charnière centrale d’un conflit humain, Mitch est très disputé par deux femmes. L’une est évidemment la radieuse Melanie et l’autre est sa mère. Le triangle est un point essentiel dans la richesse des personnages qui ne s’épargnent rien. Entre la mère possessive et la jeune qui recherche un soutien maternel, il y a beaucoup d’introspection à prévoir, mais le récit ne s’attardera que sur des rebondissements pour justifier une stabilité dans les relations que l’on trouvera. Et c’est en faisant les va-et-vient entre les assauts répétés de la volaille que l’on développera une intuition plus ouverte.

Pourquoi les oiseaux deviennent si hostiles ? Y a-t-il un sentiment de vengeance ou bien ces ailes de l’enfer ne sont que le fruit d’un châtiment promis ? La raison peut être autant religieuse qu’environnemental. Le film évoque de nombreuses possibilités et l’on comprend aisément que la cage ne sera pas assez grande pour préserver l’homme de la menace imminente. L’absence de musique renforce donc ce sentiment d’insécurité et Hitchcock en profite pour y introduire des allusions sensibles.

Le talent allié au scénario d’Evan Hunter, « Ed McBain » a permis à « Les Oiseaux » (The Birds) de s’élever au rang de monument cinématographique. Les ténèbres s’abattent sur les vices et on entend que des hurlements de rage, qui étouffent littéralement l’écran. Notre champ de vision est partagé avec les personnages, où les blessures physiques peuvent également se faire sentir. Horrifique et orné de suspense à la vue des créatures volantes, le succès de l’œuvre est mérité, bien qu’obscurs soient les motivations de ces dernières. Même si les véritables raisons des attaques spontanées des oiseaux possèdent un enjeu environnemental évident à première vue, le dénouement nuance par son silence, preuve que la victoire revient à ceux qui sauront rester unis jusqu’au bout.
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