Sur un coup de tête, Freddie, 25 ans, retourne pour la première fois en Corée du Sud, où elle est née. La jeune femme se lance avec fougue à la recherche de ses origines dans ce pays qui lui est étranger, faisant basculer sa vie dans des directions nouvelles et inattendues.

*Librement inspiré de la vie de Laure Badufle.


Des racines et des peines

Note : 3.5 sur 5.

Le triomphe de « Diamond Island » et la production de « Onoda » sonne comme une évidence pour Davy Chou, en route pour renouer avec ses racines que pourrait éprouver un expatrié. L’exil forcé d’un de ces enfants coréens pousse son auteur à interroger les victimes d’une procédure cataclysmique, créant ainsi des fossés générationnels et culturels qu’il convient d’apaiser. Le récit cherche à investir ce retour aux sources en devenant un mélo moins formel qu’il n’y paraît, au-delà de sa première petite partie. Il faudra plusieurs ellipses pour s’en accommoder et répondre aux questions qui chatouillent l’aspect rebelle d’une héroïne qui n’hésite pas à repartir à zéro pour se redéfinir et pour finalement se retrouver.

Tout commence par une chanson populaire, qui atterrit dans les oreilles de Freddie, fraîchement arrivée dans son pays natal à l’âge adulte. Le choc est immédiat et envoûtant, jusqu’à ce que cette dernière, brise tous les codes d’usage, à la table d’un restaurant ou d’un bar. Ce sont souvent ces lieux que les touristes et les locaux fréquentes, quelques fois pour la convivialité du service et d’autres fois pour tout foutre en l’air. De même, il s’agit également du siège des rencontres et des relations affectives, et la flamboyante Park Ji-min brûle tout sur son passage, la rendant ainsi malaimable pour une bonne partie de sa quête solitaire. Ce voyage improvisé se transforme ainsi en une reconquête de ses racines, allant jusqu’à renouer le contact avec ses parents, qui n’ont évidemment pas le type de réponse à lui fournir, à leur fille, à qui la langue maternelle et le soutien paternel manque cruellement pour mieux se comprendre.

On se balade ainsi du français au coréen, en passant par l’anglais, qui ne facilite pas les échanges et encore moins la compréhension de sentiments de chacun. Le cinéaste franco-cambogien capitalise alors sur la réaction de sa protagoniste, imprévisible et insaisissable. Le rejet et l’abandon qu’elle éprouve finissent par se transmettre et s’accentuent à chaque bougie qu’elle estime ne pas vouloir souffler. En intériorisant cette douleur, elle efface donc ses deux cultures qu’elle couve que ce soit vis-à-vis de ses parents biologiques, ou adoptifs, que l’on verra uniquement par le bien d’un écran. Elle prend ainsi ses distances avec sa famille et toutes ses relations, professionnelles ou sentimentales. C’est son fardeau, c’est ce qui l’a trahi à chaque tournant de sa vie, mais c’est également ce qui la rapproche de ses racines, contre toute attente.

La réussite de « Retour à Séoul » tient dans ce portrait complexe et ambigu de son héroïne, rescapée de son errance culturelle et mutilée par une identité qu’elle peine à révéler en elle. Le flirte n’est qu’un jeu, la séduction n’est qu’un moyen pour parvenir à ses fins, tandis que la vérité n’est que désillusion. Freddie traîne alors toutes ses contradictions, la métamorphosant peu à peu en femme fatale, avant de retomber dans une nouvelle déviance. Chou définit ainsi l’adoption à travers le caractère de son héroïne, à repousser les démarches de réconciliation par des pulsions, aussi éphémères que ses chroniques.


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