Top Tim Burton


Détenteur du 14ème Prix Lumière, c’est aujourd’hui un visage bien connu du monde entier qui est à l’honneur, un homme qui fait autant vivre ses créatures fantastiques que ses univers féeriques. Tim Burton est entré par la porte de Disney, avant d’en repartir assez rapidement pour son manque de liberté créative, non reconnue par le studio. Pourtant, c’est toujours à Hollywood qu’il va percer et connaître le succès auprès du public et de la critique.

Ses monstres et ses concepts artistiques deviendront alors sa signature, en y injectant à chaque fois son âme, qui le renvoie souvent à son enfance, à la fois solitaire et passionnée.


10. MARS ATTACKS! (1996)

Enfin, une œuvre venue d’ailleurs, « Mars Attacks! » désigne bien sa position radicale. On y passe un bon moment, avec des idées totalement loufoques, où Burton dézingue la hiérarchie et les plus hautes institutions, jusqu’à la Maison-Blanche et la fausse suprématie américaine. Il n’hésite pas à faire venir des dernier James Bond en date (Pierce Brosnan) et toute une tripotée de stars pour mutiler leur personnage, voire les humilier, sur la scène d’un sarcasme, qui est loin d’être anodin. Les négociations avec les géants des studios sont difficiles, voire impossibles, alors le réalisateur prend cette adaptation et ce projet de commande comme le compromis idéal pour y injecter sa frustration et son commentaire justifié sur les dérives de l’administration.
9. FRANKENWEENIE (2012)

Pour un instant plus familial, « Frankenweenie » de Tim Burton saura vous attraper avec simplicité. Victor Frankenstein est son fidèle ami Sparky sont inséparables ou presque. Un incident incite l’enfant à accepter le deuil de son chien, mais ce sera par la science et l’amitié qu’il tentera le tout pour le tout, afin de le ramener à la vie. C’est toujours aussi triste, plus d’une décennie après sa sortie, où le cinéaste y trouve un alter ego en Victor, un gamin solitaire, qui vit de son art de l’image et de son imaginaire sans limite. Ce retour en noir et blanc chez Disney est un gage de respect envers celui dont le studio ne voyait pas le potentiel, ni la sensibilité. Mission accomplie, car les enfants sont toujours réceptifs à ce film, plein de spectacles, de promesses et de stop-motion.
8. LES NOCES FUNEBRES (2005)

S’il y a bien un stop-motion abouti parmi les autres, ce sont bien « Les Noces Funèbres » de Burton, toujours dans la démonstration d’une maîtrise artistique hors du commun. Ce qui a fait la gloire des films des monstres géants, en pensant notamment au grand gorille et des dinosaures de Skull Island, s’est transcendé dans l’animation en pâte à modeler et autres marionnettes sur décor rigide. Une seconde vie est donnée à cette technique, élégante dans sa forme la plus archaïque. Et au-delà de ça, le film joue sur la frontière entre la vie et la mort, tout en commentant l’amour comme l’enjeu tragique d’un mariage bien curieux. Il s’agit pour les héros de se retrouver et acter leur sentiment, avant que la mort ne les séparer à jamais.
7. BEETLEJUICE (1988)

Les studios Disney, c’est derrière lui et pour Burton, il s’agit d’enfin reprendre la main sur son art de l’image et du récit. En remplaçant, ni plus ni moins que Wes Craven à la volée, le réalisateur californien a commencé à se bâtir une esthétique propre à lui, tout en lançant Michael Keaton dans une carrière florissante à ses côtés et en révélant Winona Ryder. Il nous séduit avec une irrésistible comédie horrifique, dont on retiendra les dérives d’un locataire en costume à rayures blanc et noir, notamment lors d’une scène de repas bien possédé. De la fraîcheur, du rire et un soupçon de frissons, c’est avec « Beetlejuice » que l’on peut commencer par découvrir les codes, que le cinéaste va peu à peu affiner dans son antre imaginaire.
6. ED WOOD (1994)

Les outsiders, Burton en a longtemps fait partie, que ce soit dans son enfance ou dans sa carrière de cinéaste, avant qu’il puisse encore voler de ses propres ailes. En revenant sur la biographie d’Ed Wood, celui qui s’est vu attitré du pire réalisateur de l’histoire du cinéma par des journalistes, deux ans après sa mort, le cinéaste entrevoit une issue optimiste pour ce métier, qui a autant passionné le bonhomme que celui que l’on a rapidement lynché pour ne pas avoir pris le temps de sonder la sincérité de son auteur. Ce parallèle est de rigueur et on ne se prive pas de redonner du courage, en transformant Wood en personnage, voire une créature burtonienne, et en lui bâtissant le mérite qu’il convient, du point de vue des coulisses. Ce film, n’ayant pas réussi à rencontrer son public à sa sortie, reste néanmoins un message fort sur le travail de création et l’immortalité des auteurs à travers leurs œuvres, qu’elles soient inabouties ou peu convaincantes.

Notons d’ailleurs qu’il s’agit du seul long-métrage que Danny Elfman ne signe pas avec Burton. Il a été remplacé par Howard Shore.
5. BATMAN (1989)

Une chauve-souris luit dans un ciel bien ténébreux. C’est le cas de Gotham, en proie au crime et au chaos, mais rien ne sera définitif tant que Batman sera là pour les réprimer. Malheureusement, un traumatisme d’enfance le hante toujours et un ennemi étrangement maquillé va lui résister. Ce premier duel vient revendiquer cette part ludique du super-héros sans pouvoirs, qui en appelle essentiellement à sa ruse et l’effroi qu’il génère pour vaincre. Le règne par la terreur trouve cependant ses limites, qu’il convient d’identifier chez son ennemi et chez soi, où l’obscurité du héros peut cacher plus de maux dans son intimité que de gadgets dans sa cave high-tech.
4. BATMAN – LE DÉFI (1992)

La première immersion dans le Gotham de Burton a séduit un public, toujours sceptique des adaptations. Pour ce film, c’est son extension qui a continué de nourrir la névrose. Pourtant, il n’y a pas lieu de s’inquiéter avec tant de styles, autant accordé à l’anti-héros que ses adversaires, tous plus machiavéliques les uns que les autres. La menace vient ainsi de l’ombre des égouts et des gouttières, mais c’est également la ville qui se transforme et qui appréhende la pertinence du justicier masqué. Un combat anthologique nous attend, au sommet du pouvoir et de l’influence que chacun portera sur la masse. Quel monstre doit-on devenir pour y parvenir ? Le commentaire est glaçant et triomphant !
3. SLEEPY HOLLOW (1999)

Un cavalier sans tête terrorise un village et on dépêche Johnny Depp à la rescousse pour enquêter. La nouvelle de Washington Irving a trouvé preneur dans un emballage gothique maîtrisé par un Burton généreux en éléments horrifiques. Il rend ainsi hommage aux productions horrifiques de la Hammer, mais on se gardera bien d’en dire trop, afin de laisser un peu de place aux héroïnes du récit, dont la dépendance de certaines peut s’avérer plus tranchante qu’une lame maudite. La vengeance est donc un plat qui se mange sans tête et sans cage pour la retenir.
2. BIG FISH (2003)

On pourrait facilement réduire « Big Fish » à son emballage, rappelant l’épopée de Forrest Gump dans une Amérique libérale et en crise identitaire, mais il ne faut pas oublier cette autre délicatesse, si chère à Burton, qui nous donne autant envie de partir à l’aventure que d’en revenir aussi triomphant et déterminé que son héros. Il s’agit bien évidemment d’un jeune homme rêveur et amoureux, conscient que la fatalité de la mort ne l’empêchera pas de jouir de toute une vie, remplie de rencontres et d’un conflit ultime, qu’il est nécessaire de résoudre avec son fils, avec qui il s’est embrouillé. L’adaptation libre du roman de Daniel Wallace trouve ainsi une esthétique follement somptueuse chez Burton, au détour de la thématique centrale, la réconciliation. Ayant perdu ses deux parents sur les deux ans avant la signature du contrat, le cinéaste trouve le moyen de panser ses plaies, à la force d’un conte d’une grande habilité et d’une grande humanité. Une vie pour une vie, le bonheur se transmet ainsi.

Nous étions également à deux doigts qu’un certain Steven Spielberg ait la charge de la réalisation, mais il s’est rabattu sur un autre récit tourmenté entre un père et son fils en vadrouille (Arrête-moi si tu peux).
1. EDWARD AUX MAINS D’ARGENT (1990)

La consécration de tout son art et de toute sa sensibilité, on la retrouve bien évidemment dans « Edward aux mains d’argent ». Entre Frankenstein et un conte autobiographique, Burton nous invite dans sa vision de l’enfance, celle qu’il a passé à tailler son intellect pour grandir et exister, tandis que des regards noirs l’oppressaient. Il n’est donc pas étonnant de retrouver un sculpteur formidable, dont la monstrueuse apparence rebute un voisinage dépourvu de sensibilité. C’est avant tout ce que recherche le cinéaste dans un discours clair et simple, à travers l’émotion peut (re)naître un enfant, du moment qu’il puisse enfin exprimer sa passion, de ses doigts aiguisés et découvrir le monde, de ses yeux les plus innocents.

Et vous, à quel monstre vous identifiez-vous ? Quel Burton a su vous emporter ?

Quoi qu’il en soit, venir découvrir ou redécouvrir l’artiste par son travail, c’est tout ce qu’on lui souhaite.

Alors choisissez-en un, voire plus, et bons films !


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5 commentaires

  1. Ce classement correspond peu ou prou au mien, si ce n’est que j’y aurais ajouté l’étonnant “Sweeney Todd”.

    • Étonnant, mais qui ne m’a pas laissé un souvenir impérissable depuis. Dans tous les cas, il est bon de rappeler ce qui a fait la force de Burton, dès lors dans une veille artistique radicale.

      • Disons que son travail me passionne moins depuis 2012. Je n’ai pas vu son “Dumbo”, la série “Mercredi” pour laquelle il a réalisé quelques épisodes ne me tente pas. J’ai l’impression d’une marque de fabrique qui propose une formule sans surprise.
        Il y avait au moins dans “Sweeney Todd” une tentative de s’écarter de son univers classique, à travers un récit très sombre, sous la forme d’une comédie musicale. Un film à réhabiliter, vraiment.

      • C’est évident qu’on a évidé les dernières réalisations de sa substance et que son nom ne sert que le marketing. Son « Dumbo » ou comme toutes les adaptations live-action de Disney ne redorent aucunement l’usine à rêves. Et par respect pour le cinéaste, je n’ai pas passé plus de deux épisodes sur « Mercredi », à l’école des monstres, car il n’y a vraiment rien à en tirer.
        On espère quand même une dernière œuvre détonante de sa part, qu’il se retrouve une dernière fois dans son carnaval de monstres.

      • Je ne me suis pas laissé tenter par “Mercredi” qui, pourtant, semble séduire nombre d’abonnés à N.
        Burton est désormais une marque, c’est vrai, on peut même dire qu’il est devenu ce qu’il détestait il y a près de quarante ans. On parle désormais d’une suite à “Beetlejuice”, rien de rassurant quant à son devenir d’auteur à l’esprit rebelle.

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