L’histoire de Fred Rogers, un homme de télé américain dont le programme éducatif Mister Rogers’ Neighborhood a été suivi par des millions de téléspectateurs entre 1968 et 2001. A l’occasion d’une rencontre en vue d’écrire un article sur ce sujet, un journaliste du magazine Esquire va découvrir un homme à l’opposé de ce qu’il en pensait a priori.

Un regard sans haine

Note : 3 sur 5.

La télévision a toujours fait débat entre ce qui nous est montré et l’envers du décor. De plus, la réception est toujours à prendre avec minutie, car cet outil n’a pas forcément pour but d’interagir avec le spectateur. Pourtant, parmi ces émissions peu lucratives, au moins une d’entre-elles sort du lot, à savoir « Mister Rogers’ Neighborhood ». En enchaînant promptement avec « Can You Ever Forgive Me ? », Marielle Heller s’applique à nous dévoiler la personnalité d’une icône américaine. L’émission pour enfant est détournée dans un interview qui convoque deux opposés, mais deux humains, face aux mêmes sentiments que la vie nous apporte ou nous retire. Ce film nous enseigne ainsi la gestion d’émotions fortes, celles qui peuvent à la fois créer des liens et les briser.

Et malgré toutes les apparences, l’œuvre prolonge le discours de l’émission d’origine, mettant alors en relief l’homme qui rend tout bonheur possible, mais pour ceux qui la redoutent et pour ceux qui l’ignorent. Fred Rogers (Tom Hanks) est d’une incroyable bonté, d’une écoute irrésistible et d’un soutien morale gargantuesque. Sa prestation, sa patience et son élocution nous rappellent ô combien nous ne cessons de vivre dans la panique, alors que lui, se pose et nous répond avec de bonnes volontés. Le portrait d’un personnage devient celui d’un homme, pourtant ordinaire, mais à l’esprit bien trop pur pour qu’on le croit réel. Cette sensation se ressent à chaque échange avec l’admirable bonhomme, qui n’est pas aussi méticuleux pour rien. Tout finit par se justifier et tout est mérité. C’est justement en confrontant cette entité avec le journaliste Lloyd Vogel (Matthew Rhys) que l’on va finir par explorer non pas l’âme de Rogers, mais celui du véritable patient.

Nous pouvons aisément nous identifier derrière cet homme, ce mari, ce père, cet humain rempli de faiblesses. Il arrive un moment où tout nous dépasse et sa situation profite à une tendre discussion. La première leçon, la voici. Elle s’adresse aux petits comme aux grands. Personne ne manque vraiment d’expériences pour avancer, mais juste des conseils bienveillants pour partir à point dans une vie parfois violente et qui nous effraie. Et pour cause, il faut également revoir ce que l’Amérique a à se reprocher, car il n’y a pas que des individus qui peinent à se relever. Comme un adulte, la nostalgie rattrape le présent, avec es maux ou des traumatismes qui ne demandent qu’à être partagés pour mieux les affronter. Mais cet exercice, reproduit une mise en scène de la télévision très reconnaissable, voire prévisible, marquant ainsi la limite entre l’icône et son sujet. L’essentiel viendra du public et de sa réception, qui ne peut se laisser convaincre aussi facilement. Il faut d’abord s’armer d’empathie et de recul pour enfin rentrer dans les détails.

En somme, « L’Extraordinaire Mr. Rogers » (A Beautiful Day in the Neighborhood) est un bon ami, celui qui veut du bien et qui y croit. Son rapport au monde résonne comme simpliste et n’apporte pas toujours les nuances souhaitées aux problématiques citées ou simplement suggérées. Le récit nous invite tout bonnement à ouvrir les yeux et de garder notre sensibilité à l’écoute, comme pour toute séance thérapeutique. On se permet alors de définir ce qu’est un honnête homme, médiateur et généreux dans ce qu’il peut proposer ou apporter. Les influences de Mr. Rogers se comprennent, sans forcément sombrer dans une lourdeur évidente. Il ne s’articule pas comme une solution, mais comme un guide, s’enfermant dans une perspective qui peut déplaire à certains, mais rien ne peut briser son identité ou ses bonnes paroles.

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