James Bond a quitté les services secrets et coule des jours heureux en Jamaïque. Mais sa tranquillité est de courte durée car son vieil ami Felix Leiter de la CIA débarque pour solliciter son aide : il s’agit de sauver un scientifique qui vient d’être kidnappé. Mais la mission se révèle bien plus dangereuse que prévu et Bond se retrouve aux trousses d’un mystérieux ennemi détenant de redoutables armes technologiques…


Love & Death

Note : 2.5 sur 5.

Voilà près de 60 ans que le personnage de Ian Fleming a conquis le grand écran. Tantôt avec panache, tantôt avec une rigueur millimétrée, la saga de la production EON aura vu passer six interprètes, dont le dernier retiendra notre attention. Il s’agit d’une tragédie en cinq actes, qui a fortement chamboulé les codes de l’espion malicieux, délicieux, érotique et collectionnant autant que possible les amantes que les voitures et les gadgets de luxe. Celui qui préfère ses cocktails « au shaker, pas à la cuillère » est pourtant aussi attendu que redouté. L’audace reste la bienvenue, c’est que promettait l’ère Daniel Craig, qui touche à sa fin. Le fil rouge est tenu et maintient un degré d’intérêt pour une débauche à présent mesurée, mais qui laissera plus de place à un drame intimiste et amoureux. Le dernier cadeau pour l’espion le l’on aimait, c’est une sortie propre, déchirante et explosive.

Le réalisateur américain, Cary Joji Fukunaga, et auteur du magnifique « Sin Nombre » a suffisamment de matière à rendre hommage au personnage, mais surtout à son symbole, qui continue de diviser les puristes littéraires et les cinéphiles, avides d’expériences. « Casino Royale » nous a déjà fait tourner la tête, avant de prétendre à une sensation émotionnelle, que l’on n’avait pas ressenti depuis « Au Service Secret De Sa Majesté ». « Quantum Of Solace » a ensuite été maladroit dans son désir de vengeance, puis « Skyfall » a su panser les plaies passées du héros et « Spectre » en venu gâcher la fête, en sous-exploitant amèrement son méchant emblématique, ses enjeux et ses thématiques. « Mourir Peut Attendre », ou plutôt « No Time To Die » joue sur l’attente et la fatalité du temps, qui écrase les Hommes et leurs émotions. Mais il aura beau se démener, il traîne quelques mêmes défauts du précédent opus, tout cela éparpiller dans ce 25e (très) long-métrage.

Il ne s’agit plus seulement d’action pure et dure, James Bond saigne, souffre et vieillit. Craig a su apporter cette touche de subtilité et de tendresse qu’aucun autre interprète n’aurait eu le temps, ni l’opportunité de donner. Oui, il quitte le navire avec les honneurs. Mais avant cela, il est important de se remémorer le peu de choses qu’il nous reste après la projection, dont quasiment toutes les cases des gimmicks ont été cochées. Ce n’est pas facile d’en finir, mais l’on y met les moyens, au moins pour la double séquence pré-générique, donnant le La et haussant le ton d’une sincère mélancolie. La sublime chanson d’Eilish viendra ensuite accentuer le mystère, jusqu’à ce que l’on nous jette brutalement dans un labyrinthe de convenances, à en perdre du rythme et l’adrénaline qu’on nous aura généreusement injectée dans les premières minutes. Hans Zimmer ne parvient pas non plus à renouveler sa partition et manque d’insuffler de la tension, où il en faut. Cela ne veut pas dire pour autant que l’on remet la créativité au placard, bien au contraire. Cependant, les quelques rares tentatives de surprendre chutent aussi vite qu’elles s’envolent.

Nous revoilà donc au point de départ. Bond est au bord de la rupture et de sa retraite, tandis que d’autres personnages secondaires viennent se greffer à son aventure. Et ce sera le casting féminin qui montera d’un cran, en nous dévoilant une pétillante Ana De Armas et une prometteuse Lashana Lynch en agent double zéro. Hélas, la première n’intervient qu’une poignée de minutes, tandis que l’autre tente d’exister, même en tant que faux-rivale. Ce décalage est d’autant plus flagrant lorsque l’on prend au premier degré les apparitions comiques et forcées du scientifique russe. Et c’est un problème qui suscite le désarroi, car ce constat est extrapolable à une fusillade dans les bois et à la pseudo-enquête du MI6 afin de déterminer le caractère criminel d’une menace mondiale. Ainsi, Rami Malek ne campe pas un vilain à la hauteur de son arme virale, car elle servira davantage ce bon vieil agent aux yeux bleus. Christoph Waltz aurait presque la meilleure emprise psychologique, si le dénouement ne rehaussait pas le niveau de cet ultime chapitre.

Une super-base isolée et de la bagarre en plan-séquence, ce donjon est le lieu idéal qui justifiera les galons d’un double zéro engagé. Mais ce ne sera pas seulement au nom de la couronne qu’il répondra. Léa Seydoux redonne de la chaleur à sa Madeleine, aux secrets qui n’ont pas vraiment lieu d’être, du moins pas de cette façon. C’est en arborant un écusson d’amour et de mort qu’il rejoint sa douce, chose qu’on lui avait déjà amputée avec Vesper (Eva Green). Mais alors que reste-t-il du personnage ? On l’évoque déjà comme l’ombre de lui-même, comme un paria. Mais le culot vient de ceux qui assument cette direction que l’on impose au héros, déjà en fin de parcours. La surcouche est posée. Il fallait espérer, douter et oser. Et quand bien même le visage de Bond changera, il reviendra toujours pour nous rappeler que « we have all the time in the world ».


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