Dans un village reculé du Costa-Rica, une femme de 40 ans renfermée sur elle même, entreprend de se libérer des conventions religieuses et sociales répressives qui ont dominé sa vie, la menant à un éveil sexuel et spirituel.


Suivre le cheval blanc

Note : 3.5 sur 5.

Ce premier long-métrage, de la costaricaine-suédoise Nathalie Álvarez Mesén, offre un délice matinal et sensoriel d’une qualité rare, alors même qu’il tient en étau une héroïne qui défie tous les codes. En quête d’émancipation, du haut de ses quarante bougies, nous découvrons une femme possédée par le désir, par la sensualité et par une soif de liberté. Ce sera évidemment question du joug masculin, mais uniquement avec parcimonie. C’est à la force d’un esprit animal et de la suggestion de la nature qu’on en vient à froisser l’imaginaire collectif, autour de la sainte Clara (Wendy Chinchilla Araya). Constamment dans le sillage de l’oppression religieuse et d’un contrôle parental omniprésent, son quotidien devient l’objet d’une réflexion, le temps d’un poème, d’un geste ou d’un simple contact avec ce lieu maudit, qui l’a bercé et qui la conditionne dans une prison mentale.

L’audace vint donc de cette atmosphère, que l’on irrigue par la direction des comédiens, qui en diront plus à travers les actions qu’avec les mots. Clara minimalise d’ailleurs la parole, en préférant leur donner un autre sens, une utilité qu’elle pourra s’approprier. La cinéaste en fait de même afin de suggérer l’intrusion du réel dans le conte et du vice-versa. Son personnage prend ainsi connaissance de l’environnement qu’on lui interdit, au-delà des poteaux pourpres qui balisent son espace de vie, ou plutôt de non-vie. Elle le sonde au nombre de maisons qui la séparent de l’homme qu’elle convoite (Daniel Castañeda Rincón). Ses instincts parlent souvent pour elle et la rapprochent de son seul confident, Yuca, son cheval blanc. Par-ci et par-là, ce sont les symboles qui se superposent, qui l’éloigne de plus en plus de la pureté à laquelle on lui associe. Elle en a marre d’être propre, marre de ne pas pouvoir s’habiller comme elle le souhaite, mare de tout ce monde qui l’assigne au foyer, malgré son handicap.

Peu à peu, on lui retire la possibilité de fuite, la liberté de transcender ses pensées, même les plus tabous. On sanctionne ainsi chacune de ses tentations, car Clara ne peut disposer de son corps. C’est le constat navrant et pertinent qui sévie dans la réalité, filmée avec un recul méthodique et inspiré lorsqu’il s’agira de l’isoler entre deux fleurs. Sa dualité avec sa jeune sœur Maria (Ana Julia Porras Espinoza) apporte alors tout ce qu’il faut au récit, pour que l’on imagine Clara investir la peau d’une pseudo-Carrie, une sorcière pour ses semblables, mais que l’on enchaîne avec des principes qui n’ont plus rien de chrétien. « Clara Sola » prend le contrepied de toute écriture intuitive sur ce qu’est être une femme de nos jours et sur les différentes barrières qui la séparent de la mort. Il lui faudra alors plus d’une source, afin de laver toutes les blessures qu’elle aura emmagasiner. Nous avançons ainsi, par à-coups, où l’espoir lui traîne dans les pattes, à la fois comme un moyen de dissuasion et un outil vers sa délivrance.


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