Le récit de la traque d’Oussama Ben Laden par une unité des forces spéciales américaines…


Une vengeance morale

Note : 3.5 sur 5.

Connue pour son « Point Break », puis pour son triomphe mondial avec « Démineurs », Kathryn Bigelow rempile chez l’armée des États-Unis pour un bras de fer de l’ombre. L’Occident est impuissante face au « mal » et les événements qui se sont succédé à partir du 11 septembre 2001 n’ont fait qu’alimenter cette obstination ravageuse pour non pas rétablir la justice, mais pour se faire justice. La différence est subtile lorsque l’on en parle, mais remise dans son contexte, il est tout à fait cohérent de comprendre cette détermination aveugle, quasi-intuitive pendante près de dix ans.

D’entrée de jeu, on nous isole dans le plus grand secret, où la violence et la torture font le cœur du métier de la CIA. La traque pour débusquer Oussama Ben Laden nous est montrée comme fastidieuse. La superpuissance de persuasion ne suffit évidemment pas à résoudre le problème majeur du début du XXIème siècle. L’anti-terrorisme prend ainsi plus d’ampleur, en nous plongeant dans ces lieux publics, banals et qui semblent calme à vue d’œil. Mais l’orage continue de s’abattre dans le quotidien. C’est pourquoi la mise en scène prend un air de documentaire, un travail rigoureux du scénariste-journaliste Mark Boal. Les grandes étapes de cette chasse à l’homme sont discutées autour de la hiérarchie américaine, avec tous les désaccords qui les accompagnent.

C’est donc à travers le portrait féminin de Maya (Jessica Chastain), qu’on tente de chercher l’ultime vérité dans ce récit empreint de réalisme. Elle se dresse ainsi contre ces hommes musclés ou entêtés dans leur foi, abusée par la violence et ce sentiment d’impuissance face au fantôme chassé. On se place alors subtilement entre deux points de vue, où la réalisatrice fait confiance à son public pour juger des faits. La perspective du mal et des méthodes engagées chez les agents américains sont traitées à l’état brut, sans que l’on puisse y discerner une morale d’état. Du patriotisme ? Le récit s’en détache partiellement afin que l’étude puisse pleinement profiter à nos yeux, nos oreilles et notre nostalgie.

À l’image d’une épopée mythologique, « Zero Dark Thirty » déploie ses arguments avec une construction narrative très psychologique. Maya devient ainsi l’ambassadrice d’un jeu qui peut heurter la sensibilité de certains. Comme contre l’industrie hollywoodienne, ce personnage tient tête à un système qui emploie à contenir ses clichés, au détriment d’une idéologie fortement éprouvée. On ne passe pas à côté de certains clichés de guerre, mais dans le genre romanesque nous serons très peu servis. Ce qui compte, c’est essentiellement la fascination pour cette pseudo-addiction, dont le dénouement reflète clairement le ton que l’on recherche lorsque la vengeance est à considérer avec recul et parcimonie.


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