22 juillet 2011, en Norvège. Après s’être rendu responsable d’un attentat à la bombe meurtrier à Oslo, le terroriste d’extrême droite Anders Behring Breivik se rend sur l’île d’Utøya déguisé en policier et commet un massacre, tuant 69 personnes et en blessant par balle 33.


Le procès de la Norvège

Note : 3 sur 5.

Au prélude d’un long-métrage consacré à « Utoya, 22 Juillet », Paul Greengrass porte également un regard sur les attentats de 2011 sur le territoire norvégien. Outre Jason Bourne, le réalisateur est passé par « Bloody Sunday », « Vol 93 » et « Capitaine Phillips » notamment, illustrant avec crédibilité l’hommage rendu aux victimes d’événements dramatiques. Il parvient à capter notre attention en isolant des individus et leur personnalité, qu’ils soient marginaux ou non. On traite ainsi des traumatismes d’un pays, qui passe devant le tribunal que le terrorisme convoque de manière sanglante et attristante.

Militant d’extrême-droite, Anders Behring Breivik (Anders Danielsen Lie) est un fanatique qui inspire à transmettre ses motivations par la terreur. Il y parvient sur de nombreux points en provoquant une explosion à Oslo, puis un massacre de jeunes militants travaillistes sur l’île d’Utoya. Le réalisateur ne se prive pas de citer cette personne, froide et pourtant consciente de ses actes, pour appuyer le discours qui orne son passage sur ces drames. De ce fait, nous n’échappons pas à une première demi-heure sans pitié, où l’on se promène aux côtés du tireur. On y suit ses actes abominables dans une sobriété déconcertante, afin de poser le contexte. Mais tout le développement du récit réside dans le procès à venir, ainsi que les retours d’un pays en deuil et en colère.

Nous assistons à un assortiment de mises en scène maladroites, insistant sur le décalage post-traumatique des survivants de la fusillade, dont Viljar Hanssen (Jonas Strand Gravli). Son témoignage, sa volonté de rester sur ses deux jambes, tout comme son duel de regard et de morale face à l’entité qu’il essaye d’apaiser sont futiles. Sa présence dénote un développement familial qui se tient, mais qui n’insiste pas sur les bons traits, ou du moins on les amplifie et on traîne régulièrement sur le même niveau, sans entrevoir une évolution nette avant le dénouement. Il manque un soupçon d’empathie qui échappe complètement au contrôle du réalisateur sans le vouloir. Peut-être que cette version américanisée pousse à entrevoir des possibilités quant à l’approche du terrorisme une fois identifiée, mais lorsque le mal a frappé, il est question de débattre sur la stabilité du système dominant, celui qui tient le dernier mot et qui ne montre pas de signes de fatigue ni de fractures. On cherche à se placer à l’échelle humaine pour structurer une narration de qualité, mais qui manque de cette intensité propre à un état d’esprit colérique et qui naïve par suite d’une expérience angoissante.

Le Premier ministre norvégien de l’époque Jens Stoltenberg (Ola G. Furuseth) et l’avocat de Breivik, Geir Lippestad (Jon Øigarden) font partie de ces hommes qui baignent dans un système trop fermé sur ses codes. On s’y enferme également dans cette intrigue qui nous mène vers un procès anecdotique, si ce n’est l’importance des échanges entrevus entre le bourreau et son pays « malade ». Et c’est en regardant Anders jouer avec le gouvernent que l’on se rend compte des faits, que ce soit dans l’absurde ou non. La fidélité est de rigueur dans ce « Un 22 Juillet » et son arsenal de scènes qui ont fait polémique. Greengrass rassure en ce point où il ne sombre pas dans l’éternel cliché d’un portrait stylisé et limité du mal. Il lui accorde un fondement symbolique, qui sera incomplet malgré tout. Le reste se lit en ouverture, derrière la montagne de cadavres et les cicatrices d’un monde qui tend à s’unifier, dans la chasse et dans la compassion.


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