1882, Saint-Pétersbourg. Sacha, jeune fille de l’aristocratie russe, a toujours été fascinée par la vie d’aventure de son grand-père, Oloukine. Explorateur renommé, concepteur d’un magnifique navire, le Davaï, il n’est jamais revenu de sa dernière expédition à la conquête du Pôle Nord. Sacha décide de partir vers le Grand Nord, sur la piste de son grand-père pour retrouver le fameux navire.


L’odyssée du Nord

Note : 4 sur 5.

L’exploration polaire a longtemps été un défi pour les plus intrépides, n’hésitant pas à confronter les conditions climatiques extrêmes de la mer et des glaciers simplement pour atteindre le sommet géographique du monde. Pour son premier long-métrage, Rémi Chayé s’impose donc un grand défi à portée de sa brosse numérique, où les traits et autres détails de contours sont délaissés, afin de libérer les aplats de couleurs. Son identité visuelle rend la contemplation des grands espaces plus intenses et permet de resserrer notre attention sur les émotions des personnages dans les autres instants. Pourtant, rien n’est figé dans cette animation, qui mute en permanence, de même que ces nuances de couleurs, qui donnent un bon coup d’air frais à notre visionnage.

Dans la lignée des plus grandes odyssées de Jules Verne (Les Aventures du capitaine Hatteras, Michel Strogoff, Vingt Mille Lieues sous les Mers), ou encore d’un soupçon d’Howard Phillips Lovecraft (Les Montagnes Hallucinées), nous faisons la rencontre de Sacha, petite-fille d’Oloukine, explorateur disparu dans sa conquête du Pôle Nord. Convaincue de pouvoir retrouver son brise-glace échoué, la jeune aristocrate russe va mettre la main à la pâte, en sacrifiant tout le confort de son palace luxueux, contre un voyage extraordinaire. Pas question de se laisser faire, son caractère témoigne de sa conviction et de son courage, évidemment mal vu par des hauts rangs d’une cour royale, très à cheval sur ses principes. En renversant le rapport de force qui l’oppose à son peuple, Sacha va donc à la rencontre de celui-ci, qui ne lui fera pas de cadeau.

Une aventurière est née, une carte à la main et le cœur plein d’espoirs. Des rencontres inattendues et la bienveillance de certains vont la pousser à assumer son émancipation et son indépendance. Tout cela se lit sur les visages, tantôt fatigués, tantôt enjoués. Si le rythme peut nous laisser refroidir sur la dernière ligne droite, il faut garder à l’esprit cette âme que possède l’adolescente, qui s’autorise enfin à exister et à gagner la reconnaissance des autres. La musique de Jonathan Morali pousse ainsi les grandes voiles du navire qui l’emmènera vers les réponses qu’elle attend, entre le doute et la vérité.

« Tout en haut du monde », c’est bien là que l’héroïne se tient, rappelant ainsi le poids de son bagage culturel et de sa détermination, constituant le porte-étendard qui peut en inspirer d’autres. Sacha file au sauvetage de ses racines et loin des profits, qui dictent les personnages masculins qui l’entourent. Tout le monde finit par apprendre de ses erreurs, la leçon est élégante, notamment dans un exercice de style qui peut encore multiplier les portraits de personnages aussi jeunes, habiles et sincères. De cette manière, Chayé en vient à se convaincre que finalement l’Homme est capable de prendre la mer à ses dépens. Et il le fait en nous dévoilant une fable saisissante.


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2 réponses à « Tout en haut du monde »

  1. Je l’ai vu à peu près au moment de sa sortie et j’en ai gardé un très beau souvenir. J’ai retrouvé dans ton texte la délicate poésie des images, des personnages élégamment profilés en couleurs pastels. Merci pour cette belle carte postale.
    Passe de très belles fêtes de fin d’année.

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    1. Heureux d’avoir ravivé tes souvenirs.
      Merci beaucoup et bonne fin d’année également !

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