Gabrielle, 30 ans, intègre une prestigieuse émission de reportages. Elle doit très vite trouver sa place au sein d’une équipe de grands reporters. Malgré l’engagement de Vincent, leur rédacteur en chef, ils sont confrontés au quotidien d’un métier qui change, avec des moyens toujours plus réduits, face aux nouveaux canaux de l’information. Habités par leur passion pour la recherche de la vérité, leur sens de l’humour et de la solidarité, ils vont tout tenter pour retrouver la foi de leurs débuts et se réinventer.


En terrain miné

Note : 2.5 sur 5.

Être vu, être entendu, être témoin et être un porte-parole… Le journalisme est un exercice délicat qui consiste à prendre le pouls de l’humanité à chaque instant. Il en capture également les progrès, mais ce sont avant tout des enquêteurs. Rechercher, vérifier et transmettre l’information, tels sont ses devoirs. Depuis, ce crédo rajoute l’audience à l’équation et une part de responsabilité qui pousse davantage les médias à s’engager sur tous les fronts, de la culture à la politique. De plus en plus schizophrénique, ce métier de terrain est souvent relégué au second plan et Vivants tente d’en dérouler toutes ses spécificités, qu’elles soient techniques, humaines ou sensationnelles. Malheureusement, le film d’Alix Delaporte (Angèle et Tony, Le Dernier Coup de marteau) se prend les pieds dans le tapis à force de radoter et de manquer l’essentiel en sous-estimant les bienfaits de la fiction.

Ce métier d’action qui n’a, en soi, que faire des curriculum vitæ. Gabrielle apprend le métier sur le tas, en touchant à tout et en répétant les mêmes gestes. Mais tout n’est pas aussi mécanique qu’on ne croit. Certaines scènes témoignent justement d’initiatives, maintes fois risquées et peu de fois récompensées. C’est aussi dans cette incertitude, liée à la sécurité et l’intégrité des journalistes que la réalisatrice capte « la vérité ». Toutefois, elle serait à prendre avec des pincettes, car son film, aussi stimulant à intellectualiser soit-il, reste bancal dans son ensemble.

Les personnages peinent à exister en tant qu’individus et en tant que groupe. Rares sont les séquences émouvantes, car le processus est trop descriptif et pas assez immersif. Ce blocage ampute ainsi toutes les chances d’entrer en empathie avec des protagonistes dont les dialogues sont un peu trop surlignés pour que les échanges nous paraissent naturels et pertinents. Le manque de spontanéité balaie ainsi toutes les tentatives d’immersion avec une équipe où la solidarité est omniprésente, malgré quelques confrontations et contradictions. Tout le monde fait en sorte de pousser la machine dans la même direction. C’est sans compter les contraintes du diffuseur, révélant ainsi l’instabilité économique d’une activité de plus en plus indépendante. Delaporte déplore également des conditions de vie alarmantes, car ces individus n’ont ni le temps pour eux-mêmes, ni pour leur (éventuelle) famille.

Vivants reste finalement surface de son étude première : édifier le journalisme à travers l’image qu’il renvoie au quotidien et à travers les images que les reporters tentent de dénicher, au prix d’une vie rangée, de leur sécurité et de leur intégrité morale. Pas de fulgurance remarquable au sein du groupe. Roschdy Zem a finalement peu à jouer, lui qui est le père ou le grand frère spirituel de l’émission. Alice Isaaz surnage dans cette équipe, mais la cadette qu’elle incarne ne peut qu’apprendre de ses aînés. Elle constitue le point d’accroche du spectateur dans cette mêlée, qui flirte avec les limites de la ligne éditoriale. On ne joue pourtant pas assez avec cette frontière. De fait, jamais les images reconstituées ne valent celles des archives qui nous sont données de découvrir. Et même si le dénouement dévoile un ultime moment de communion au sein de l’équipe, où il s’agit de se frayer un chemin dans la foule au cœur de Paris, le montage de la réalisatrice ne se montre pas à la hauteur de la fiction qu’elle propose. L’immersion journalistique disparaît ainsi dans cette conclusion, trop maladroite pour émouvoir et pas assez signifiante pour honorer le prestige de la profession.


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